Les goûts et les couleurs ça ne se discute pas ! Zoyah croyait dur comme fer à ce vieil adage. Facilité en cela par le fait qu’elle aimait pratiquement toutes les couleurs même si sa préférence allait au bleu roi et au doré. Elle possédait donc des tenues aux diverses coupes, déclinées dans de multiples coloris et confectionnées dans des étoffes au moins aussi variées.
Elles les avaient soigneusement préparées, prêtes à être misent en malle mais Masacio avait gentiment protesté.
Vous n’avez pas besoins de toutes ces fanfreluches ma douce. Et vous savez bien qu’un rien vous habille…sourire persuasif.
Presque tout bon le Masa mais…
Des fanfreluches ?! Mes soieries vénitiennes, mes damas, mes velours, mes satins, mes mousselines de Mossoul, mes damasquins venant de Perse, mes baldaccino, camocas, cendal, dabiky, camelot, futaine…sur un ton outré, le regard alarmé.
Et bien dites-vous qu’ils pourraient leur arriver malheur, chargés comme nous serions…plantant ses émeraudes dans le bleu des yeux de sa promise, un air résolu sur le visage…je vous ai déjà narré ce qui est arrivé à la baronne de Lignière et ses fabuleuses toilettes….d’une voix compatissante. Allez, prenez donc celle-ci, celle-là, l’autre là-bas parce que je l’aime beaucoup et encore la bleue au fond et contentez vous ensuite de tenues pratiques…la serrant de ses bras. Puis la sentant hésiter, lui susurre tendrement à l’oreille...s’il venait à manquer de quoique ce soit, je suis prêt à parier que nous trouverions une échoppe de tisserand/tailleur à votre goût.
Et c’est sur ses mots que la confrontation avait été close et que Masacio avait alourdi sa bourse de quelques centaines d’écus au cas où.
Le voyage avait été agréable, d’une part parce que l’abandon des innombrables toilettes n’avait provoqué aucun émoi chez la jeune tisserande qui s’imaginait déjà les merveilles de haute-couture qu’elle allait pouvoir dénicher en Poitou et puis parce qu’elle appréciait par-dessus tout ses moments où elle se retrouvait confinée avec lui.
Rares moments où, serré l’un contre l’autre, rien ne venait les troubler.
C’est donc blottit contre son promis que la jeune femme découvrit les tours crénelées du domaine du chancelier du Poitou. Et dans sa grande générosité, Zoyah lui avait confectionné de ses longs doigts fins et habiles, une succulente tarte aux pommes caramélisées. Elle espérait, du reste, que cette dernière n’aura pas trop souffert du voyage. Il y avait eu les chaos de la route pour la malmener, sans oublier les innombrables assauts de Masacio qui avait bien fini par avoir raison de la tarte. C’était sans compter sur la malice de Zoyah qui lui avait rétorqué alors qu’il se plaignait d’une fringale et de l’obsédant arôme de cette tarte aux pommes qui lui chatouillait les narines. :
Si vous veniez à manquer de quoi vous sustenter, je suis prête à parier que nous trouverons une pâtisserie dont l’étalage comblera votre appétit.
Et la conversation fut close et la tarte pomme sauve. C’est le chancelier du Poitou et sa douce épouse qui vont être content.
Regardez amour !...je crois que nous arrivons…se levant pour passer sa tête à la fenêtre et mieux jouir du panorama.